Allocution du Grand Maître du GODF le 1er mai 2016 au Cimetière du Père-Lachaise
Communiqués et discours | Publié le 04/05/2016 | émis le 01/05/2016
Madame la Maire,
Dignitaires des Obédiences amies,
Mes Très Chères Sœurs, mes Très Chers Frères,
Chers amis, car parmi nous peut-être y a-t-il des profanes qui sont les bienvenus,
Nous nous retrouvons, toujours plus nombreux, chaque année en ce cimetière du Père Lachaise. Evidemment, c’est une vraie émotion que de voir ici des visages qui nous sont connus et familiers et qui prouvent l’attachement des Francs-maçons à ce rassemblement qui fête dignement son 20ème anniversaire.
Nous avons au cours de cette matinée rendu hommage aux grandes figures qui nous ont précédés et grâce auxquelles nous pouvons aujourd’hui œuvrer à la Franc-maçonnerie à laquelle nous croyons.
Mais ne nous leurrons pas, mes très chères Sœurs, mes très chers Frères, l’Internationale dont Pottier dessinait l’utopie n’existe toujours pas, le temps des cerises que Clément appelait de ses vœux n’existe toujours pas et la République universelle à laquelle nous travaillons depuis maintenant presque trois siècles ne cesse de reculer et de s’éloigner, jour après jour.
Á un moment où une certaine élue de la République a pu, haut et fort, dans l’indifférence générale, dire que les valeurs de la République la saoulaient, je le dis, mes Sœurs et mes Frères, il y a des ivresses dangereuses et nauséabondes. Ce n’est pas une ivresse à laquelle je souhaite m’adonner. Mais prenons garde au dégrisement car nous ne pourrons pas dire ce jour-là que nous ne savions pas.
Au moment où une certaine élue de la République laisse entendre que la liberté, l’égalité et la fraternité ne sont qu’un détail de l’histoire politique française, voire une obsession, je dis : soyons plus vigilants que jamais parce qu’une bête immonde est en train de prendre à nouveau forme dans notre pays. Dans quelques années, il sera peut-être trop tard. Cette bête immonde, nous devons la combattre avec la plus grande fermeté et la plus grande résolution. Ce fut toujours le sens du combat des Francs-maçons, c’est le combat d’aujourd’hui et de demain.
Dans le même temps, nous voyons que certains idéologues obscurantistes instrumentalisent les religions pour crier haut et fort que les laïques sont des mécréants qui doivent être décapités.
Mes très chères Sœurs, mes très chers Frères, prenons garde, là encore, car les menaces s’amoncèlent et assombrissent l’horizon qui est le nôtre.
L’heure est sombre en effet, malgré le soleil printanier qui nous rassemble aujourd’hui en ce 1er mai. L’heure est sombre et nous devons, en Francs-maçons que nous sommes, dans la droite ligne de tous ceux qui se sont sacrifiés pour les idéaux de la République, être aujourd’hui les artisans d’une insurrection des consciences. Cette insurrection des consciences est indispensable pour redonner à la République et aux valeurs auxquelles nous croyons l’énergie, la volonté, la détermination que trop d’entre nos concitoyens ont tendance à oublier.
Ce combat, nous devons l’engager à un moment où la laïcité ne bénéficie pas du soutien politique sur lequel elle devrait pouvoir s’appuyer. On ne peut que dénoncer l’immobilisme politique aujourd’hui dont la laïcité est victime. Mais, Madame la Maire, si je partage vos appréhensions, je ne peux que regretter aujourd’hui le fait que la laïcité soit la grande victime d’une sorte de tétanie qui s’est emparée de nos gouvernants et qui empêche à celle-ci d’être le véritable rempart dont nous avons besoin pour reconstruire la République.
Oui, sans la laïcité, la République mourra. La laïcité n’est pas dirigée contre les religions, mais j’aurais envie de dire, s’agissant des religions dans l’espace civique : cela suffit ! La République ne s’est pas construite sur un œcuménisme interconfessionnel, au contraire elle a montré la capacité pour chaque citoyen, quelles que soient ses origines, religieuses, culturelles, sociales, ethniques, de se hausser au-delà de ces assignations pour former le véritable Serment du Jeu de Paume qui est celui qui a toujours animé l’esprit de la République.
Bien entendu, c’est à cela que la laïcité doit nous inviter en rappelant le respect des règles, règles au bénéfice de tous. Règles qui ne sont pas non plus le monopole indu des partis extrémistes. Sans règles, il n’y a pas de République, il n’y a pas de vivre ensemble. Parce que le vivre ensemble n’est pas la juxtaposition d’individus ou de communautés qui s’ignorent. Sauf à accepter qu’il n’y ait plus de société.
Nous devons nous faire, nous Francs-maçons, les avocats de cette culture, parce que nous avons toujours su conjuguer les libertés et les devoirs. Sans devoirs, les libertés ne sont que des revendications.
Voilà ce que nous devons avoir présent en tête au moment où nous sommes rassemblés. L’heure est grave et tous les Maçons, quelles que soient leurs Obédiences, doivent être unis dans ce combat commun, dans cet impératif qui nous est aujourd’hui fixé si nous ne voulons pas préparer des temps sombres qui viendront inexorablement nous engloutir.
Voilà, mes très chères Sœurs, mes très chers Frères, ce que je voulais dire très simplement mais avec résolution parce que nous serons dans les mois qui viennent devant des échéances que nous ne pourrons pas négliger. Mais au-delà de ces échéances, c’est bien entendu l’avenir de notre société qui se joue et nous ne devons pas perdre de vue que la France a aussi un rôle à jouer au regard du monde à travers l’histoire qui a été la sienne, les projets qu’elle a portés, les principes qui l’animent.
Si demain notre Nation, notre République n’était pas à la place qui doit être la sienne, alors on peut craindre que le monde dans lequel nous vivons ne devienne un véritable chaos.
Mes très chères Sœurs, mes très chers Frères, je suis très fier d’être Franc-maçon et tout particulièrement en ce moment. Ne baissons jamais la garde, soyons des Francs-maçons sur le pont, des Francs-maçons de combat parce que l’humanité le demande et nous sommes responsables de son devenir.
J’ai dit.
Daniel Keller
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