Humanisme et Démocratie après ce 1° tour.  A lire sur ce lien avec les illustrations

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Le 1° tour des élections régionales se traduit par un véritable bouleversement des équilibres politiques. Le Front National sort grand vainqueur et atteint des scores inégalés qui le place en situation de prendre la présidence de plusieurs exécutifs régionaux.
 
La situation est inédite mais pas inattendue ! Sous la voûte étoilée tente d'attirer l'attention des francs-maçons depuis au moins deux ans sur l'incompatibilité des valeurs de la franc-maçonnerie avec celles du Front National et demande aux obédiences de prendre position...
 
Inutile de se mettre la tête dans le sable. Le FN a su utiliser, et habilement, les procédures démocratiques pour s'installer dans l'opinion et apparaître comme un parti comme les autres, un parti dédiabolisé. Or ce n'est pas le cas. Il n'est pas lui-même un parti démocratique et encore moins républicain.
 
 
Quoiqu'en disent ses aficionados, tant les valeurs qu'il défend, les fréquentations de ses dirigeants avec l'extrême droite européenne, voire avec des anciens Waffen-SS comme Franz Schönhuber, avec d'anciens dirigeants du GUD (ici, ici, ici,  ) les us et coutumes (plus ou moins facilement contenues) de certains militants, les références et les alliés de ses nouveaux et jeunes dirigeants, tout atteste de sa présence dans les couloirs nauséabonds des aventures du temps. Là où l'on classe les heures les plus noires de notre histoire...
 
Cette situation mérite une attention particulière et, en tout état de cause, comporte au moins deux grandes séquences : l'urgence face à la menace et la reconstruction.
 
1° SEQUENCE : L'URGENCE.
 
Alors qu'avec le premier tour  apparaît la mise en place d'un tripartisme sur les ruines du traditionnel bipartisme de la V° République, l'urgence est à la préparation du second tour. Le Front National est aux portes du pouvoir dans trois régions : Nord-Picardie ( Marine Le Pen), PACA (Marion Maréchal-Le Pen), Grand-Est (Florian Philippot). La riposte ne pouvait venir que de tous les démocrates, de tous les républicains. Elle devaitt être simple et claire : s'opposer, par tous les moyens, à l'accès de l'extrême droite au pouvoir dans ces 3 régions.
 
L'enjeu.
Ces seconds tours devraient donc se réduire à un affrontement entre les forces démocratiques et celles du Front National. C'est-à-dire que l'adversaire commun à la droite et à la gauche, dans la diversité de ses composantes, est l'extrême droite.
 
Face à cette situation inédite depuis une cinquantaine d'années et qui peut apparaître choquante - et elle l'est ! -  il aurait été nécessaire d'appliquer la règle dite de la discipline républicaine : face à un adversaire commun, celui qui arrive en troisième position se désiste.
 
Toute position alternative pose une vraie question quant aux objectifs poursuivis. En effet, se maintenir en 3° position et créer ainsi les conditions d'une élection "triangulaire", c'est faciliter la victoire du Front National. Que cette décision soit celle à droite du président de "Les Républicains" ou à gauche du candidat socialiste dans la région Grand-Est vaut une égale désapprobation.
 
 
Et parallèlement, il faut saluer la décision d'appliquer cette règle de la part des listes (socialistes) arrivées en 3° position en Nord-Picardie et PACA. Les candidats l'ont fait avec une grande dignité.
 
Maintenant, les citoyens sont devant un choix crucial, et particulièrement celles et ceux qui n'ont pas participé au scrutin dimanche dernier, celui de se rendre aux urnes pour le 2° tour.
 
Les francs-maçons sont, eux, devant le constat du peu de prise en compte claire du combat contre les idées de l'extrême droite ! Le Grand-Maître du Grand Orient de France, Daniel Keller, a fait le job dans le JDD sous ce titre : "Contre le FN, les candidats arrivés en 3e position doivent se retirer". Jean-Pierre Masseret, le candidat socialiste du Grand-Est l'entendra-t-il avant mardi 18h00, deadline du dépôt des listes de candidatures ?
 
On pourra s'interroger sur les raisons qui poussent un Grand Maître à prendre une telle position. Certes, ce n'est pas courant car il recommande là une consigne de politique organisationnelle. Pour insolite qu'elle soit, cette prise de position comme d'ailleurs l'ensemble de l'interview, jette un regard sans complaisance sur la réalité de ce bouleversement politique annoncé et sur les inéluctables conséquences qu'il nous faudra, toutes et tous, en tirer !
 
La menace.
Ce scrutin est spécialement marqué par les mauvais scores des deux partis de l'échiquier démocratique républicain, c'est-à-dire la droite et la gauche. Dans chacun des territoires où se vivent ses situations, les citoyens devront analyser sereinement, région par région, les raisons qui expliquent ces pertes d'influence. Et en dépit des douleurs que cela pourra provoquer,  se garder des fuites en avant vers des listes aventureuses. Car l'extrême droite est TOUJOURS une aventure !
 
Et pour faire cet examen, ils n'ont devant eux que quelques jours : dimanche prochain, il faudra émettre un vote. Et ce vote sera décisif !
 
 
La Fraternelle parlementaire.
La "Lumière" nous apprend que cette fraternelle a lancé un appel. Puisqu'il existe, il faut en dire un mot.
 
Rappelons qu'une "Fraternelle" est un regroupement de francs-maçons "de droite et de gauche", qui ont en commun de partager certains centres d'intérêts (artistiques, professionnels, culturels, géographiques, etc.). Sous la Voûte étoilée considère que  les fraternelles ne sont qu'un ersatz de franc-maçonnerie car la franc-maçonnerie n'existe qu'en Loge !
 
Cet appel est arrivé un peu moins d'une heure après la décision de retrait de la liste Nord-Picardie. Il est signé de son président, le député Christian Bataille, qui est l'un des élus de cette région.
 
Belle et prompte réaction de la fraternelle parlementaire ! Elle semble prendre, cette fois, la mesure de la situation. Il faut s'en féliciter. D'autant plus qu'elle ne s'est jamais précipitée pour répondre aux différents appels que nous lançons depuis plusieurs années à dénoncer l'incompatibilité entre le FN et la franc-maçonnerie...  
 
Mais, alors qu'il faut sauver les meubles, comment ne pas l'apprécier comme bien tardive... Et combien vertueuse quand le candidat, Xavier Bertrand, n'a qu'une très très modeste considération pour ceux dont il a pourtant besoin des voix... Mais ce "frère" nous a habitué à des pratiques "originales" (ici, ici, ici) !
 
Néanmoins, aujourd'hui pour demain !
La situation est à ce point critique qu'il est absolument essentiel d'aller au fond des choses et considérer que l'intérêt supérieur de la défense de la République passe bien au dessus des considérations partisanes et/ou des intérêts personnels. Il n'est d'autre perspective aujourd'hui  que d'assurer le barrage aux candidats de l'extrême droite dimanche prochain et dès le lendemain, de se mettre aux tâches de l'heure.
 
2° SEQUENCE : REPARER LA REPUBLIQUE.
 
Et ces tâches de l'heure sont considérables au regard du bilan que l'on devra tirer, sans complaisance, de la 1° séquence. Telles que nous pouvons l'envisager d'ores et déjà, au vu des évènements de ce scrutin, il s'agit de réparer la République, d'en consolider à nouveau les bases.
 
L'ascension de l'extrême droite, le passage de parti de contestation au parti de conviction qu'est devenu le FN, suppose que nous interrogions toutes nos pratiques sociales, tous nos modes de décision, tous nos usages, toutes nos politiques publiques depuis une trentaine d'années. Il nous faut comprendre, au delà des explications simplistes, mécanistes ou  caricaturales, comment et pourquoi nous en sommes arrivés là. Car il y a un super bug !
 
Quelques pistes.
Essayons, d'ores et déjà, d'avancer quelques pistes.
 
La situation économique désastreuse qui installe depuis les années 1970 un taux de chomage important comme variable d'ajustement des stratégies économiques des entreprises est un diktat insupportable qui a néanmoins été accepté tel quel par tous les gouvernements. Alors qu'il aurait été indispensable de permettre la réflexion macro-économique sur cette situation et favoriser la compréhension par les salariés et plus généralenent par les citoyens, des phénomènes économiques, n'avons-nous pas perdu le sens du débat idéologique ?
 
N'avons-nous pas laissé s'installer dans nos habitudes la facilité de penser comme nos médias préférés nous dictait de le faire plutôt que d'élaborer nos opinions par nos propres réflexions ? Et c'est précisément à ce niveau que les organisations du monde du travail, notamment les syndicats, ont un rôle essentiel à jouer... N'a-t-on pas, trop rapidement, considérer qu'ils étaient plutôt des empêcheurs d'exploiter-en-rond que des facilitateurs du dialogue social, et ce faisant des facilitateurs aussi de l'éducation sociale et de la mémoire sociale des entreprises...
 
N'avons-nous pas (trop) préféré nous réunir par pure facilité avec ceux qui adoptaient les mêmes conclusions que nous (les fameuses associations de proximité, les amicales, et même les partis) plutôt qu'avec ceux qui ne partageaient pas le même point de vue et en profiter pour développerle gout du débat contradictoire, source d'éducation citoyenne ?
 
Et n'avons-nous pas, ainsi, favoriser le creusement du fossé entre nous ? Ce "nous" qui désigne finalement un maillon essentiel de la communauté nationale, un secteur du "vivre ensemble" que les francs-maçons ont, pourtant, vocation à défendre ?
 
C'est ainsi que peut réapparaître cet indispensable précepte pour tout exercice de la démocratie, à savoir qu'on ne naît pas citoyen mais qu'on le devient par l'éducation, notamment populaire ! Cette éducation à la citoyenneté que les gouvernements, tous les gouvernements depuis les débuts de la V° République, ont voués aux gémonies...  Car l'éducation populaire est l'école de la citoyenneté, l'éducation au Libre Arbitre, la consolidation de la volonté de s'instruire par soi même ! Cette traduction kantienne de la devise des Lumières : Sapere Aude : aie le courage de te servir de ton propre entendement ...
 
Dans un article au Huffington Post publié le 15 mars 2014,  Daniel Keller parlait de "Reconstruire la République". Il y disait notamment :
"... à l'heure où l'on constate la vacuité du débat d'idées, il est essentiel de raviver la réflexion collective sur le devenir de notre société. Ce n'est pas en occultant la dimension prospective de l'existence qu'on parviendra à renforcer l'esprit civique. L'avenir doit être l'horizon du politique. La tyrannie du court terme est le plafond de verre contre lequel se brisent les interrogations de chacun. Il est temps de s'en affranchir, c'est ainsi que l'on ravivera la conscience citoyenne sans laquelle toute République se meurt et que l'on fera reculer l'esprit de vindicte. Celui-ci atteste souvent du refus panique d'affronter l'avenir au motif qu'il serait pire que le temps présent."
 
Car l'esprit civique, lui aussi, s'éduque, s'acquiert... Et il existe des pédagogies spécifiques, produit de l'histoire et des luttes populaires. Qui, en dehors des francs-maçons, pourraient encore les défendre aujourd'hui ? Sous la Voûte étoilée attend les candidats avec grand intérêt...
 
Les stratégies politiques.
Il faut enfin interroger les stratégies politiques. Les évoquer en passant au crible de la réflexion les notions de lutte des classes, de front de classe(s), de social-démocratie, de front républicain... Parler de ce qui différencie, vraimentc'est-à-dire au fond, la droite de la gauche.
 
Au delà des slogans qui ont freiné la réflexion collective au malsain prétexte de "formation politique", ne faut-il pas "remettre à plat", non pas les fondamentaux des analyses, y compris marxistes, mais les conclusions, les conséquences qui n'ont plus aujourd'hui de contenus opérationnels ?
 
Il faut probablement avoir le courage de réinterroger pas mal de nos "certitudes", en tous cas d'avoir le courage de les remettre en débat, pour construire une alternative au modèle de développement de la doxa politique aujourd'hui. Cette reconstruction ne peut se réaliser qu'à l'intérieur d'un cadre humaniste, d'une grille de lecture qui place l'être humain au coeur de toute la démarche. Une grille de lecture cohérente où chaque item renvoie à l'homme et à sa place en tant que sujet décideur, en tant que sujet réputé capable, a priori, de s'autodéterminer.
 
Le pacte social républicain.
Les francs-maçons, soeurs et frères, de la franc-maçonnerie libérale proclament être les défenseurs de la République et les héritiers de la philosophie du siècle des Lumières. Alors le moment n'est-il pas venu de les voir prendre une initiative publique ? Par exemple celle d'oser enfin évoquer ce qui rassemble les citoyens au sein du pacte social républicain, au delà des appartenances partisanes... Pour ce faire, les francs-maçons libéraux devront assumer leur identité et leur modèle maçonnique, c'est-à-dire celui où aucun dogme ne vient limiter leur liberté absolue de conscience, où aucune transcendance ne vient guider leurs travaux, où aucun serment ne peut leur faire abdiquer leur libre arbitre. C'est une liberté, précieuse, qu'il leur faut construire. C'est une liberté qu'ils doivent revendiquer pour tous les êtres humains, où qu'ils résident, quelle que soit leur origine !
 
Le débat entre les organisations républicaines.
Les différences dans les prises de position des partis républicains, les débats qui les animent, montrent que l'on est loin de la prise de conscience qu'il est devenu indispensable de privilégier ce qui nous rassemble !
 
Il faut dire que cette démarche est l'exact contraire de la logique politique habituelle. Celle qui consiste à toujours creuser plus l'écart pour faire apparaître la différence sur laquelle on va fonder sa propre existence. Car il faut admettre que le modèle politique de la V° République est suicidaire pour la démocratie. L'essentiel vital étant, toujours, d'exacerber sa différence pour exister ! Peut-être que l'état de la vie politique aujourd'hui oblige à changer cela ! Peut-être que le moment est venu pour les francs-maçons de faire comprendre que le développement de l'humanité, en tant que principe philosophique, oblige à changer radicalement de modèle institutionnel.
 
Et plus qu'un numéro qui ne fait que favoriser les amalgames, le moment n'est-il pas venu de définir les éléments significatifs d'un nouveau modèle constitutionnel...
 
 
N'oublions pourtant pas...
Que le Front National soit arrivé en tête fait passer au second plan le rebond de la participation. Un peu plus d'un million et demi de nos concitoyens semblent avoir repris le chemin des urnes... Difficile d'être plus affirmatif dès lors qu'un mouvement de plus de 800.000 nouvelles inscriptions lors de la révision des listes électorales avait été enregistré !
 
Assiste-t-on à un véritable retour ou est-ce là une sorte d'échange entre d'anciens inscrits ayant définitivement opté pour le non vote et l'arrivée de nouveaux votants ?
 
 
 
4,5 points de plus.
Quoiqu'il en soit, ce surcroit de participation place ce 1° tour comme un net regain de vie démocratique. C'est un message fort à quelques semaines seulement des attaques terroristes lancées par Daesh avec l'objectif de nous diviser et de porter un coup aussi dur que possible à notre modèle démocratique. Il semble bien que ce soit raté !
 
Cette soirée aura connu si peu d'évènements positifs qu'il convenait de ne pas omettre celui-ci...
 
Gérard Contremoulin