Le chant des canuts.
Une chanson souvent associée à l’épisode insurrectionnel lyonnais de 1834 alors qu’elle est bien plus tardive. C’est en effet à l’occasion de l’exposition de Lyon de 1894 que l’auteur, Aristide Bruant, crée cette chanson, évocation des travailleurs lyonnais de la soie.
Aristide Bruant (1851-1925) : Précisons tout de suite, Aristide Bruant est un monument de la chanson française. Elève brillant, Aristide se retrouve obligé de travailler dés 16 ans pour faire face aux créanciers de sa famille. Tour à tour employé chez un avocat puis ouvrier bijoutier, Aristide Bruant se tourne vers la chanson et particulièrement vers la chanson populaire rédigée en argot dont il devient un spécialiste. Très vite son succès est immense et son œuvre marquera plusieurs générations de chanteurs : Il chante Paris et ses quartiers, le petit peuple comme dans « Nini peau de chien » et « la chanson des canuts ».
A l’énoncé du nom des canuts, on songe immédiatement aux insurrections du début du 19ème siècle. Les canuts sont les travailleurs de la soie de lyon, qui transforment à façon et à domicile, les fils de soie produits en Ardèche pour le compte des grandes familles de soyeux lyonnais. Installé sur les pentes de la Croix Rousse, c’est tout un monde industrieux qui travaille et anime la première activité de la ville de Lyon.
En 1831, puis en 1834, les canuts entrent en rébellion contre les soyeux afin d’exiger un tarif minimum, entendez par là une juste rémunération pour leur travail. Par deux fois, les canuts se retrouvent, sans trop l’avoir cherché, maîtres de la ville après la fuite des élites. En 1834, la rébellion se heurte à une sévère répression orchestrée par la Monarchie de Juillet. L’intervention de l’armée, canons à l’appui aura tôt fait de venir à bout des barricades de la Croix Rousse. 600 morts jonchent les rues de la ville et le long cortège des prisonniers prend le chemin de la déportation et des bagnes d’outre mer (tenez ! l’Algérie par exemple puisque l’on vient juste de la conquérir !).

La révolte des canuts s’inscrit donc dans le cycle des journées révolutionnaires qui débute en 1789 et s’achèvera en 1871 avec « la commune de Paris » (voir la chronique de la chanson « le temps des cerises »). C’est aussi, au début du 19ème siècle, l’émergence d’une classe ouvrière caractérisée par la misère et l’espérance d’un monde meilleur, un groupe social qui n’a pas grand-chose à perdre à l’image de la devise des canuts « Vivre libre ou mourir en combattant ».

 

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A Bruant par Toulouse Lautrec

Parole de chanson Les Canuts

Pour chanter Veni Creator Il faut une chasuble d'or
Pour chanter Veni Creator Il faut une chasuble d'or
Nous en tissons pour vous, grands de l'église
Et nous pauvres canuts, n'avons pas de chemise
C'est nous les canuts Nous sommes tout nus !
Pour gouverner, il faut avoir Manteaux ou rubans en sautoir.
Pour gouverner, il faut avoir Manteaux ou rubans en sautoir.
Nous en tissons pour vous grands de la terre
Et nous, pauvres canuts, sans drap on nous enterre
C'est nous les canuts Nous sommes tout nus !
Mais notre règne arrivera Quand votre règne finira :
Mais notre règne arrivera Quand votre règne finira :
Nous tisserons le linceul du vieux monde,
Car on entend déjà la révolte qui gronde
C'est nous les canuts Nous n'irons plus nus !
C'est nous les canuts Nous n'irons plus nus !